– On va courir ?
– Cela m’ennuie, il pleut, ce ne sera pas agréable.
– Allez, un peu de courage on y va ! Méthode Coué !
– Tu as raison ! Go !
Nous connaissons l’expression « la méthode Coué », expression populaire qui sous-entend une forme
d’optimisme gonflé par une sorte de déni de réalité, et qui suggère une auto-persuasion plutôt futile.
Cette expression véhicule une connotation quelque peu négative, et n’a pas toujours bonne presse
Pourtant, la « méthode Coué » existe bel et bien. Son créateur, Emile Coué (1857 – 1926) était pharmacien, puis deviendra également psychologue. Il a ouvert à l’âge de 26 ans une officine dans la ville de Troyes, ville dont il était originaire. Il s’intéressera ensuite à l’hypnose, et se passionnera pour cette discipline basée sur la suggestion verbale et se rapprochera alors de l’école de médecine de Nancy. Il établira une nouvelle officine dans cette ville à partir de 1910. Il y fondera en 1913 l’école lorraine de psychologie appliquée. Scientifique et technicien, il va se pencher sur le processus de guérison, et en tirera une méthode, qu’il condensera dans un écrit : « La maîtrise de soi-même par l’autosuggestion consciente »
Au fil des années, sa pratique, le contact avec les malades l’amène à découvrir les possibilités de la suggestion et l’action déterminante de l’imagination dans le processus de la guérison. Son idée maîtresse est que nous avons en nous les clés et les forces qui nous permettent d’aller mieux : notre imagination, ou notre volonté peuvent être un ami ou un ennemi, un accélérateur ou un frein à notre mieux-être, à notre réussite.
Aujourd’hui, il est considéré comme le précurseur de l’autosuggestion et le père de la pensée positive, puis de la psychologie positive. Au début du 20ème siècle, des figures politiques, des têtes couronnées, des entrepreneurs venaient d’Amérique ou d’Europe pour le rencontrer. Il a écrit un seul ouvrage, La
maîtrise de soi-même par l’autosuggestion consciente, ouvrage de développement personnel, dans lequel il développe sa méthode, la méthode Coué. Il a été en son temps décrié, moqué, et certaines personnes ont répandu un peu partout que sa méthode était inefficace.
Le lien ci-dessous vous plongera dans une conférence donnée par Emile Coué : c’est un podcast qui vous permettra de l’entendre expliquer les ferments de l’autosuggestion.
https://www.youtube.com/watch?v=mjUrpxTUWX4
Pourtant, malgré l’écho enthousiaste au-delà des frontières françaises que sa méthode suscita , malgré les résurgences dans le domaine des neurosciences que ses travaux amenèrent, Emile Coué n’est jamais entré dans le panthéon des scientifiques, des créateurs ou des précurseurs.
En somme, Emile Coué, qui a laissé à la postérité une méthode et une expression, a écrit bien avant tout le monde qu’on a en soi les ingrédients de notre propre réussite, et qu’on peut être le héros de notre propre vie.
Son ouvrage est court, synthétique, simple, mais jamais simpliste.
Emile Coué explique que par l’imagination, nous communiquons avec notre subconscient : nos images, nos représentations ont des effets certains sur notre comportement.
En effet, une pensée négative aura un effet dévastateur, alors que la pensée positive, aura quant à elle pour conséquence de développer l’énergie. Nous avons, par ailleurs la liberté et la capacité d’imaginer ce qui est possible et ce qui est positif ; imaginer permet de se mettre en chemin.
Son ouvrage traduit cinq postulats, ou lois :
1. Une pensée, bonne ou mauvaise, que nous avons en tête est pour nous la réalité et a tendance à se réaliser
La réalité se conforme à notre imagination, et à ce à quoi nous nous attendons. Si on s’attend à réussir, on aura plus de chances de réussir ; et si, au contraire, on s’engage avec la perspective de l’échec, on se met alors davantage en route pour échouer.
2. Une des facultés de l’être humain est son imagination.
Nous pouvons imaginer les choses positivement. Imaginer est le point de départ pour trouver les chemins possibles qui peuvent nous permettre de réussir. L’imagination va alors s’aventurer sur les espaces inconnus.
3. Quand il y a une lutte entre la volonté et l’imagination, c’est toujours l’imagination qui triomphe, sans aucune exception.
La volonté ne sert pas si l’imagination dessert l’objectif souhaité. Quand on veut, on ne peut pas tout le temps. Si on veut réussir un examen, à 200 pour cent, et si notre imagination dresse tous les obstacles, les difficultés, les souffrances qui se dressent sur la route de cet objectif, alors la volonté, aussi gonflée soit-elle ne résistera pas.
4. Quand l’imagination et la volonté sont en accord, elles font plus que s’ajouter, elles semultiplient.
Tous deux sont porteurs d’une énergie, d’un dynamisme. Parfaitement alignés, ces états vont décupler leurs forces.
5. L’imagination peut être conduite.
On peut agir sur l’imagination. On peut amener des solutions mentales, des images, qui vont agir comme des solutions.
Emile Coué écrit son ouvrage « La maîtrise de soi-même par l’autosuggestion consciente » avec le concours de la Société Lorraine de psychologie appliquée en 1922. 2022 sera l’année du centenaire de la méthode Coué, l’occasion, pour nous d’explorer cette époque d’entre deux guerres, ces années folles des années 20, période de faste et d’insouciance, d’un renouveau qui fait suite à la première guerre mondiale, époque du rêve, de l’utopie et de la fête.
L’année 1922
La naissance de la première station radio émise depuis la Tour Eiffel
Au cinéma, Robin des bois de Douglas Fairbanks
En littérature, c’est l’année de la parution d’Ulysse de James Joyce, et celle de La maison de Claudine,
de Colette
En 1922, disparaît Marcel Proust. Niels Henrik David Bohr succèdant à Albert Einstein reçoit le prix nobel de physique
Aussi, c’est l’année de la première traduction d’un texte de Freud en France, Introduction à la psychanalyse, par Samuel Jankélévitch, est publiée en 1922
C’est un tableau « manifeste » qui représente la famille spirituelle du peintre : Desnos, Eluard, Gala, Breton, Paulhan, Aragon, et aussi De Chirico et Rafaël, comme annonciateur d’une renaissance à venir, celle d’une pensée, d’ une analyse psychologique des fondateurs du surréalisme : le tableau traduit les rêves, hallucinations, hypnose, et autres états « de conscience modifiée » au cours desquels ils écrivent ou composent leurs œuvres : la force artistique cachée dans le subconscient.
En 1922, la ville de Reims entame les travaux de construction d’un monument consacré aux héros de l’armée noire. Blaise Diagne, élu, député, et siégeant à l’Assemblée Nationale posera la première pierre. L’ombre de la première guerre mondiale plane sur le pays, guerre au cours de laquelle 30000 tirailleurs sénégalais périrent. En 1924, date de l’inauguration, une réplique jumelle sera édifiée à Bamako.
C’est dans ce contexte de forte croissance économique, de création artistique, technologique, sportive que paraît la méthode d’Emile Coué. La société d’alors souhaite profiter de la vie, retrouver une paix intérieure, et vivre, s’amuser, créer, pour mieux s’éloigner des lendemains incertains.
Le succès d’Emile Coué sera retentissant au-delà des frontières françaises. Il donnera de nombreuses conférences, sera sollicité en Europe, aux Etats Unis. Après sa mort, ses travaux vont sombrer dans l’oubli, et les reproches sur une approche théorique rapide et somme toute sommaire auront raison de sa notoriété
Que nous reste-t-il d’Emile Coué et de sa méthode ?
La méthode d’Emile Coué est incontestablement à l’origine de tous les courants qui ont fait émerger la pensée positive. Il est le précurseur du comportementalisme et de la psychologie positive. Sa rencontre avec le docteur Liébeault, praticien de l’hypnose et premier à évoquer la suggestion sera capitale pour ses propres recherches.
Les neurosciences continuent à valider les intuitions d’Emile Coué : nos paroles, nos pensées, nos actes ont un impact sur nos connexions neuronales : on parle ici de la plasticité de notre cerveau. La programmation neuro linguistique, la PNL, s’inspire de cette méthode. Evidemment, les connaissances scientifiques actuelles, donnent plus de corps, plus détails, plus de technicités sur ce qui se passe dans notre mental. Mais les travaux d’Emile Coué ont jeté les bases du développement personnel. La vidéo
qui suit, de Luc Teyssier d’Orfeuil, coach et formateur, éclairera sur les lois extraites de la méthode Coué.
https://www.youtube.com/watch?v=bls-QMaJ6uk
Une biographie écrite par Gilbert Garibal, docteur en philosophie, qui nous
plonge dans la vie et les principes du pharmacien, qui le replace dans le
contexte scientifique de son époque : un portrait qui permet de découvrir un
homme simple qui souhait transmettre une vision optimiste du monde.
Au final, de l’histoire d’Emile Coué, il reste peut-être surtout cette expression, « méthode Coué ! », mais elle est le garant qu’agir avec un état d’esprit positif, dans une disposition mentale de croissance ou de progrès, permet de faire les choses avec la perspective du succès. Et rien que pour cela, on peut raisonnablement attribuer à ce pharmacien de Troyes, toute notre gratitude